Intensification écologique, agro-écologie, intensification durable de l’agriculture : pourquoi cela concerne-t-il aussi les agriculteurs ouest-africains ?

18 mars 2013
Patrick Dugué, agronome, UMR Innovation, CIRAD, Montpellier et Ecole Nationale d’Agriculture de Meknès (Maroc)


Les termes agro-écologie, agriculture de conservation, intensification durable et plus rarement intensification écologique ou écologisation des pratiques sont entrés depuis quelques années dans le langage des agronomes, des décideurs et parfois des agriculteurs d’Afrique de l’Ouest. Ces nouveaux modèles de production ou de façon de produire cherchent à répondre, à la fois, au défi de la sécurité alimentaire (quantitative et qualitative) et à celui de la protection de l'environnement. Ils sont régulièrement repris dans les agendas des agences internationales comme le PNUD (Programme des Nations unies pour le développement) - avec le plaidoyer d’Olivier de Schutter pour l’agro-écologie en 2011 - ou la FAO, notamment dans son ouvrage « Produire plus avec moins » [...d'intrants], paru la même année, tous deux disponibles sur Internet. Mais ces nouvelles façons de produire sont-elles réellement insérées dans les politiques agricoles et environnementales de cette région du monde ?

Un besoin d’accroître l’offre alimentaire dans un contexte en évolution...

En Afrique de l’Ouest, l'accroissement de l'offre alimentaire locale et régionale dans un contexte de forte pression foncière (urbanisation, croissance de la population rurale) nécessite une hausse des rendements des cultures vivrières, mais aussi une réduction des pertes subies lors du stockage et de la commercialisation des récoltes. Cette stratégie devra surtout composer avec trois éléments fondamentaux et relativement récents :
  • l’augmentation du prix des engrais minéraux, qui dépend largement du coût de l'énergie fossile (fabrication, transport) ;

  • la raréfaction et la dégradation des ressources naturelles "agricoles" par habitant, du fait du fort accroissement démographique en milieu rural et de l’absence de financements publics dédiés à des mesures agro-environnementales ;

  • enfin, les changements climatiques liés à l’élévation des températures et à l’amplification des aléas pluviométriques, avec les risques concomitants : inondations, sécheresses, tornades, incendies, etc.

...en valorisant les processus écologiques de la nature

Pour certains agronomes, il est nécessaire, pour faire face à ces nouvelles contraintes, de s’appuyer plus systématiquement sur les processus écologiques fournis par les écosystèmes pour accroître la production tout en réduisant l'usage des intrants chimiques et des énergies fossiles. Cet élément stratégique constitue la base de l’agro-écologie, telle que proposée par Miguel Altieri dans son ouvrage paru en français en 1986, mais aussi le socle de l'intensification écologique (IE) promue par Michel Griffon dans ses ouvrages publiés depuis 2006. Dans les deux cas, les fondements des façons de produire s’inspirent du fonctionnement des écosystèmes naturels.

Ces approches ne sont pas spécifiques d’un continent et pas nouvelles, puisque les principes de la lutte biologique et de la lutte raisonnée contre les bio-agresseurs des cultures remontent aux années 1960. Dans un autre registre, l’importance de l’entretien du taux de matière organique des sols cultivés tropicaux a été mis en exergue dans les années 1980 ; parallèlement, les agronomes ont montré les limites voire les dangers d’une fertilisation uniquement minérale pouvant conduire, dans cette région, à une acidification des sols (dans le cas de fortes doses d’engrais utilisées chaque année et dans la durée). Les avancées théoriques récentes dans le domaine de la gestion des agro-systèmes concernent non plus un facteur déterminant la production mais un ensemble de facteurs en relation avec les composantes de ces systèmes, rapprochant ainsi l’agronomie de l’écologie (au sens de la discipline scientifique), d’une part, et l’agronomie des sciences sociales, d’autre part.

Mais la révolution verte est toujours d’actualité

Dans le même temps, on note un regain d’intérêt des responsables africains pour soutenir leur agriculture, suite aux grandes fluctuations des prix des produits alimentaires de base qui ont conduit, entre autres, à des émeutes en milieu urbain, fin 2008. Pour accroître la production agricole, en particulier celle des céréales, les Etats ont misé sur l’application des principes de la « révolution verte » promue à partir de 1960, en subventionnant les engrais minéraux pour certaines cultures et en relançant la production et la distribution des semences de variétés sélectionnées. Ce retour à la révolution verte a surtout été mis en œuvre dans les zones pluvieuses - soudaniennes et guinéennes - et dans les périmètres irrigués ouest-africains où l’alimentation en eau des cultures est assez bien assurée, afin de rentabiliser l’application des intrants. On peut aisément comprendre le choix effectué à cette période par des décideurs politiques qui voulaient rapidement augmenter la production en vue de mettre sur le marché des quantités importantes de denrées à moindre prix. Mais ce choix d’un modèle de production et d’intensification (« engrais x variétés x travail mécanisé »), réalisé dans l’urgence, doit-il perdurer ? Comment expliquer l’attrait des agriculteurs et des décideurs des zones de savane pour ce modèle productiviste dont les scientifiques ont montré les limites ?

Pourquoi les agriculteurs et les décideurs privilégient-ils le modèle de la révolution verte ?

L’analyse des choix techniques et stratégiques des agriculteurs d’Afrique de l’Ouest révèle des points communs. En effet, bon nombre d’entre eux hésitent à adopter des innovations « agro-écologiques » coûteuses en travail et pas toujours rentables à court terme. Ils privilégient plutôt le modèle de la révolution verte. Nos travaux de terrain, menés avec les partenaires des structures de recherche et de développement et des organisations paysannes, permettent d’avancer plusieurs facteurs pour comprendre ces choix :
  • l'engrais minéral peut être appliqué sur de grandes surfaces, plusieurs hectares par exploitation, si son approvisionnement est adéquat et si les agriculteurs ont accès au crédit, ce qui n’est pas possible avec la fumure organique dont les disponibilités sont réduites et ne peuvent pas croître rapidement ;

  • la culture continue et l'abandon de la jachère devenant la règle, l'usage de l'engrais minéral mais aussi des herbicides est devenu incontournable. Le recours aux herbicides courants a été facilité ces dix dernières années par la baisse de leurs prix (glyphosate, 2-4 D, atrazine…) ;

  • à assolements équivalents (grandes cultures, coton, céréales, légumineuses), ce modèle de production est moins coûteux en travail que des modèles plus "agro-écologiques" impliquant la production et l'utilisation de matières organiques, des cultures associées dont l’agroforesterie, l’enclosure des champs, etc. ;

  • l’usage des variétés sélectionnées est une solution facile à mettre en œuvre, car relativement peu onéreuse ;

  • certains effets et impacts négatifs de ce modèle de production sur les ressources naturelles sont encore mal connus ou coûteux à mesurer. C’est le cas par exemple des impacts sur la qualité de l’eau des nappes, la perte de biodiversité (macrofaune, microfaune), l’apparition de résistances aux pesticides et herbicides ou encore la baisse de la densité des arbres dans les paysages agricoles.

Comment les scientifiques peuvent-ils accompagner la transition agro-écologique ?

Les chercheurs doivent mieux se faire entendre, mieux communiquer et collaborer pour préparer les stratégies d’amélioration de la sécurité alimentaire non pas pour la prochaine campagne agricole mais pour les prochaines décennies. Autrement dit, le dialogue entre praticiens (agriculteurs, conseillers agricoles, responsables des filières…) et chercheurs doit véritablement se construire dans la durée pour appréhender ces processus dans leur dimension biologique mais aussi socio-économique, afin d’assurer durablement un accroissement de la production en regard des besoins des populations africaines. Les bases techniques de cette amélioration sont connues, mais leurs mises en pratique sont délicates : insérer plus de légumineuses dans les rotations afin de bénéficier de la fixation de l’azote de l’air – certes, mais pour quels usages et quels marchés ? Peut-on revenir aux cultures associées tout en gardant les acquis de la culture attelée (sarclage et buttage mécanisés rapides et moins pénibles que manuellement) ? Comment introduire plus d’arbres dans des champs où le bétail trouve sa ration en saison sèche ? Nous, agronomes de la recherche et du développement, avons certainement sous-évalué les contraintes internes de la grande majorité des exploitations de la région. Les agriculteurs n'ont pas une opinion toujours négative des innovations « classiques » ou « agro-écologiques », mais pour qu'ils y adhèrent il faut qu’ils y trouvent un intérêt. De ce fait, l'évaluation des innovations qu’il faut réaliser avec eux doit intégrer, en plus de l'analyse traditionnelle coûts/bénéfices, les éléments suivants :

  • les risques que les agriculteurs prennent en adoptant une nouvelle technologie, qu’ils soient d’ordre technique (par exemple, pullulation non prévue d'un déprédateur) ou économique ;

  • la temporalité du retour sur investissement. Pour les agriculteurs, l'investissement consenti pour l'adoption d'une innovation doit être rentabilisé si possible sur un cycle cultural. Cela pose problème pour toutes les innovations d'amélioration de la fertilité des sols et s’explique par le fait que les agriculteurs disposent rarement d'une épargne ou d'un accès au crédit de moyen terme et encore moins de subventions à l'investissement ;

  • le temps de travail relatif aux innovations et sa pénibilité ne sont pas toujours pris en compte dans leur évaluation. L'accroissement du temps de travail est rarement accepté par le chef d'exploitation et les actifs familiaux, sauf si le bénéfice engendré est élevé.

Face aux évolutions des conditions de production évoquées plus haut – raréfaction des ressources naturelles par habitant, renchérissement et raréfaction des matières premières nécessaires à la fabrication des intrants, externalités négatives des systèmes de production actuels –, les agriculteurs et les décideurs ne peuvent pas se tenir à l’écart des recherches menées pour une intensification durable et plus agro-écologique. Toutefois, l’usage des intrants ne doit pas être écarté, car il permet d’amorcer des processus biologiques utiles. Ainsi, les engrais minéraux sont utiles pour accroître rapidement la production de biomasse végétale indispensable pour «réactiver» les sols par un apport de matière organique conséquent. Il ne s’agit pas d’opposer systématiquement des modèles de production (productivistes vs agro-écologiques), mais de tirer le meilleur parti possible des ressources disponibles. Cette transition agro-écologique de l’agriculture prendra du temps et requiert :

  • des mesures originales d’accompagnement des producteurs (formation, appui-conseil, échanges de savoir-faire, etc.) ;

  • une mise en débat de ces nouvelles façons de produire mais aussi de conseiller, de former et de garantir la qualité des produits, avec les décideurs, les opérateurs de développement et les organisations de producteurs ;

  • des politiques publiques comprenant des mesures incitatives pour favoriser cette transition et des programmes de recherche appliquée menés dans la durée.

Mais il ne faudrait pas mettre de côté les capacités d’innovation des agriculteurs ouest-africains et leurs savoirs sur des écosystèmes qu’ils parcourent et valorisent chaque jour. La transmission de ces savoirs et leur hybridation avec les savoirs «scientifiques» constituent aussi un enjeu de la transition agro-écologique de l’agriculture.

Ce texte est tiré d’une réflexion collective présentée dans la communication « L’intensification écologique : réflexions pour la mise en pratique de ce concept dans les zones de savane d’Afrique de l’Ouest », de Dugué P., Vayssières J., Chia E., Ouédraogo S., Havard M., Coulibaly D., Nacro H.B., Sissoko F., Sangaré M., Vall E., 2011 (2-SA_minaire_Bobo_theme_1-Dugue.pdf).

 


10 commentaire(s)
Les pays africains ont d'abord besoin de manger, indépendemment de la qualité des produits et des considérations environnementales. Le niveau de la production actuelle en produits de base est extrèmement faible par rapport à la consommation. Pour le moment, le souci d'une agriculture écologique est secondaire façe aux exigences d'une production industrielle de masse. C'est comme ça qu'à démarré l'Europe il y a presque 100 ans pour satisfaire ses besoins alimentaires. Une fois l'équilbre atteint, on a commencé à parler d'agriculture raisonnée, bio, écologique ... Mettre l'Afrique aujourd"hui au même niveau de développement que l'Europe serait une transgression du temps et de la réalité socioéconomique de la région. C'est prématuré. On en reparlera peut être dans 30 ans, si tout va bien.
Ecrit le 18 mars 2013 par : Ben El Ahmar Mustapha benelahmar@menara.ma 2810

Merci l'auteur, le collectif et FARM, il est temps de tempérer l'audience des wishful thinkers en chaire ou en choeur. jm b
Ecrit le 18 mars 2013 par : bouquery@noos.fr 2811

L'Afrique comme le monde agricole est en crises : climatique, politique, éco systémique, économique, sociétale, foncière, alimentaire. Une nouvelle étape nous attend : celle non plus seulement du « risque majeur » mais bien des « mégachocs » opérateurs de destructions globales ». Il s'agit d’inventer de nouvelles solutions étonnantes et prodigieuses, d’aborder des changements fondamentaux qui conduisent à de nouveaux paradigmes et d’offrir des concepts ouverts, inventifs et partagés entre paysan(ne)s et scientifiques pour gérer ces crises et éviter des mégachaos. 1. Impératifs catégoriques - Affronter les ruptures technologiques, éco-sociologiques - Adapter les savoirs collectifs - Faire face à l’inimaginable - Enrichir la logique par l’intuitif, le sensitif - Partager avec des partenaires inhabituels - Aborder des logiques floues voire contradictoires 2. Tactique - S’engager en équipe multidisciplinaire (paysan/cuisinière/guérisseur/.....) - Mettre en commun des valeurs convergentes inhabituelles - Abandonner les croyances et certitudes apprises - Se projeter dans l’inconnu traditionnel - Détecter les « variables  dormantes » insoupçonnées - Suivre avec critique les méthodes/résultats en groupe. 3. Méthode - Commencer localement par le bas au plus près des acteurs pour découvrir les " savoirs empiriques » traditionnels des paysan(ne)s. - Continuer par le haut en appliquant les « savoirs savants » à leur compréhension et en identifiant les nouvelles contingences. - Bousculer en profondeur les grilles d’analyse rationnelle face à une rupture chaotique. - Créer de nouvelles formations scientifiques. Vous proposez après l'échec de la "révolution verte" prônée aussi en Afrique, surtout au Sahel, la "révolution doublement verte" qui reste un mixte de la 1ère et de cette dernière. Alors que l'efficacité écologique et productiviste du système de maximisation gratuite des écosystèmes vous est démontrée chaque saison par les paysan(ne)s du monde entier, même dans les pires conditions pédo-climatiques. En effet, leurs associations culturales multi étagées traditionnelles & innovantes excessivement inspirées de la nature représentent le meilleur système cultural ou "révolution triplement verte". Ces associations (type Bamiléké-Bamoun; Bashi, jardin créole et indonésien; oasis; metel; Machobane) (Baldy, 1963 ; Jung, 1966 ; Valet, 1968 & 1974 ; Hénin et al., 1969; Dala, 1974 ; Dupriez, 1980ab ; Kalra and Ganger, 1980 ; Ahmad and Rao, 1982 ; Francis, 1986 ; Salez P., 1988;...) qui varient de 2 plantes à 200 (plus les plantes sauvages alimentaires/fourragères/fruitières et médicinales/ construction ...) fournissent des services écosystémiques gratuits qui permettent d'économiser les intrants, l'eau, la fertilité et la terre. Ce système valorise le milieu mais utilise beaucoup de main d’œuvre; ce qui ralentit l'exode rurale vers les bidon-ville. Mes essais prouvent qu'en association (maïs-taro-macabo)on peut produire par unité de surface 2 fois plus avec 2 fois moins d'engrais minéral ou organique au tropique et au sahel avec 10 à 20 % d'eau en plus quand on passe d'une association mono à bi puis à tri-spécifique. de plus cette masse végétale qui couvre mieux le sol (DER>1.5 jusqu'à 9) protège contre l'érosion, restitue plus de MO au sol et régule le microclimat atmosphérique et pédologique... Les bénéfices sont évidemment au rendez vous... Au Cameroun alors qu'on perd de l argent ou on rembourse tout juste la fumure (biocide non inclus) en monocultures (arachide-soja-maïs), on en gagne avec les tubercules (5000CFA-valeur 1980) avec 12 cultures on arrive à 125000 CFA. Il reste à renforcer le « feed-back down-up» des « savoirs empiriques » traditionnels innovants, logiques et stratégiques des paysan(ne)s et des « savoirs savants » analytiques et prédictifs des scientifiques pour conceptualiser et rationaliser les meilleurs sous-systèmes adaptables aux divers éco-agro-systèmes locaux.
Ecrit le 18 mars 2013 par : VALET Serge valet.serge2@wanadoo.fr 2813

Je ne suis pas d'accord avec Ben El Ahmar Mustapha. L'Afrique a des atouts indéniables vis à vis de l'agriculture. Il faut que le transfert de technologies et de connaissances se fasse sur les dix prochaines années pour que l'Afrique atteigne le nieveau européen au plus tard en 2030. Pour cela, le transfert doit se faire à tous les niveaux . Agronomique, politique et sociétal. Agronomiquement, les atouts de l'Afrique surtout l'Afrique sub-saharienne, sont ses conditions pédo-climatiques très favorables dans beaucoup de secteurs. Le transfert de semences de base performantes croisées avec des semences locales pour acquérir plus de potentiel est largement faisable aujourd'hui surtout que beaucoup de semences européennes peuvent s'adapter à beaucoup de climats de cette zone. Ensuite, la rotation est importante : en implantant des cultures fort exigeantes en eau pendant la saison des pluies (riz, maïs, sorgho etc) et des cultures moins exigeantes en cultures alternatives, pommes de terres haricots (secs, verts selon les besoins des populations locales), pois (chiches, verts), fèves, légumes variées pendant la saison sèches avec des systèmes d'irrigations appropriés, il est certain que la productivité de l'ha africain sera amélioré et tendra à la nutrition de toute la population locale puis à l'exportation locale (pays voisin) avant l'exportation vers les pays européens ou autres. L'agriculture raisonnée commence là. L'emploi d'engrais locaux organiques par compostage ou autre permettra d'être plus performant dans les moyens de production. Le fait de faire de l'agro-foresterie permet de réduire le risque d'érosion des sols lorsqu'ils sont nus entre deux cultures ( des cultures de couverture à base de légumineuses pourraient servir pour éviter cela en augmentant la matière organique. Il faut aussi permettre aux propriétaires de se regrouper pour faire des assolements en commun et ainsi employer la mécanisation progressivement. Pour cela, il n'est pas nécessaire dans un premier temps d'avoir des engins sophistiqués mais plutôt des engins robustes qui peuvent se réparer facilement. Et surtout, le transfert de savoir passe par la formation, intégrant les gestes ancestraux avec les techniques modernes sans provoquer de rupture et que les Africains s'approprient les nouvelles techniques comme ils l'ont fait avec les TIC. Alors dans 20 à 25 ans, l'Afrique sera non seulement auto suffisante mais deviendra le grenier de l'occident. J'en suis certain mais pour cela l'Europe et les USA doivent aider l'Afrique dans les dix prochaines années à se former sur ces nouveaux savoirs qu'ils utiliseront avec leurs connaissances ancestrales, marieront les deux pour optimiser la terre qui le leur rendra au centuple.
Ecrit le 18 mars 2013 par : Richard DAMBRINE dambrine.richard2@wanadoo.fr 2814

Tout d'abord une précision concernant Olivier de Shutter qui ne travaille pas pour le PNUD mais sa fonction de Rapporteur Spécial sur le Droit à l'Alimentation relève du Haut Commissaire des Nations unies aux Droits de l'Homme. Je partage le positionnement du problème par les auteurs. Travaillant en Amérique Latine, en Afrique et en Asie, je vois parfaitement les impasses dans lesquels se trouvent les agriculteurs avec les paquets technologiques de la révolution verte, parfaitement décrit par les auteurs. Un point clef est le maintien de la fertilité des sols en l'absence de jachère, car on ne reviendra pas en arrière. Le manque de disponibilité en engrais organiques alternatifs faciles d'utilisation est effectivement un facteur limitant pour une révolution doublement verte (produire plus et mieux avec moins de chimie et plus d'écologie). Je constate également que des gisements considérables de matière organique existent dans les déchets urbains et les eaux usées, sans parler des sédiments des barrages hydroélectriques et sont inexploités. Concernant les variétés (et les races animales) supposément améliorées, elles n'en ont souvent que le nom. Il faut à mon avis que la recherche génétique revoit rapidement sa copie et se fixe des objectifs cohérents avec la nécessaire déchimisation de l'agriculture. Je ne partage absolument pas le point de Mr Ben El Ahmar. L'agriculture écologiquement intensive n'est pas la dernière lubie des "blancs" (qui comme le disait justement Steve Biko lors de son procès sont plutôt "roses") mais un impératif alimentaire et énergétique mondiale qui n'a que peu à voir avec l'agriculture biologique motivée par les impératifs de santé publique. Dans 30 ans, il sera bien trop tard malheureusement.
Ecrit le 19 mars 2013 par : Alain RETIERE alain.retiere@gmail.com 2815

Je ne suis pas d'accord avec la conclusion du commentaire de Ben El Ahmar Mustapha. Pour avoir travaillé il y quelques années sur ce sujet en Afrique de l'Ouest, je peux dire qu'effectivement il y a un besoin urgent à produire plus, compte tenu de la démographie rurale. Mais en même temps, et de ce fait, on a assisté à une baisse de la fertilité des sols et de l'environnement, pesant ainsi de plus en plus fortement sur la capacité à produire demain. Les projets de développement inconsidérés des années 70 ont incité à défricher à tout va, solution de facilité qui est bien entrée dans les usages ... L'érosion, l'ensablement des têtes de bas fond ainsi devenus improductifs, le raccourcissement des jachères en sont quelques illustrations. C'est que, dans le même temps, la pratique ancestrale du brulis a perduré et est toujours utilisé dans les rotations pour enlever la végétation qui est, pour les paysans, un obstacle à la culture. Je suis d'accord avec les auteurs du texte : l'un des enjeux de l'autonomie alimentaire des populations rurales de l'Afrique de l'ouest passe par la conception de modèles locaux d'agro-foresterie et le développement des engrais naturels, ne serait-ce que pour des raisons de coût, d'autonomie, de limitation de l'accès au crédit et de diminution des risques à faire peser sur les économies familiales. Parmi les axes à travailler avec les populations et organisations locales je pense que : - le développement de la culture attelée va dans ce sens car elle facilite effectivement le désherbage mécanique et reste maitrisable par les paysans ; elle produit du fumier - la valorisation de la matière organique, pourtant très présente en milieu inter-tropical doit être une priorité. Il faut probablement broyer plutôt que bruler (aider à l'achat de broyeurs ?), éviter de labourer profond, associer les cultures etc. Ce la prendra beaucoup de temps, voilà pourquoi il est urgent de ne plus en perdre ...
Ecrit le 20 mars 2013 par : JF Méré, ancien VP, adhérent d'AFDI jf.mere@cher.chambagri.fr 2816

Ceci est une réponse courtoise et repectueuse à M; Ben Mustapha, qui vit évidemment ces problèmes de l'intérieur (du moins je suppose, son nom étant de consonance nord africaine) alo=r que je ne suis qu'un européen certes engagé aux cpôtés de ses semblebale, mais un "extrérieur". je pense que nous vivons effectivement une époque d'accélération de l'Histoire. L'Europe s'est dotée abvant guerre et dans les années 50 d'un réseau téléphonique classqique, pui s est passé dans les années 80/90 à la téléphonie mobile. de même, dans les années 50, on se repérat sur des cartes (de diffulsion limitée parfais par les militaires, aujourd'hui nous utilisons massivement le GPS. Je le reconnais bien volontairement, e mes amis africains savent se servir ces ces technologies modernes de pointe mieux que moi. Ils n'ont pas consenti d'effort exporbitant comme l'Europe (et les autre pays dits "développés", URSS comprise) pour développer des rée seaux de téléphonie fixe. Ils sont massivement passé au GSM qui marche parfaiteme,nt, répond à leurs besoins, et ils ont eu cent fois raison. Je me demande s'il est pertinent d'opposer "révolution verte" à "accrosissement de la productivité" en passant nécessairement par une période d'intensification plus ou moins irresponsable qui a souvent pour effet uen pollution à long terme des sols par des nitrrates, pesticiedes, ... et donc conduit paradoxalement à des phénomènes de désrtification (donc bénéfice sur le court terme et perte sur le long terme) ou s'il ne vuat pas mieux tenter de synthétiser les deux (plus ou moins, je ne dis pas cela de manière extrémiste)et de faire cette "trangerssion du temps" dont parle M. Mustapha et qui a bien marché, fonctionnellement et budgérairement, pour le GQM et le GPS. Mais bien entendu sa question est pertinente et son soiuci hautement respectable. Bien cordialement, Gérard BEGNI
Ecrit le 20 mars 2013 par : Gérard BEGNI, CSFD/CNES gerard.begni@cnes.fr 2817

Bonjour Merci pour votre commentaire. Je partage avec vous le besoin d'accroitre la production agricole pour d'une part une plus grande souveraineté alimentaire des pays au Sud du Sahara (mais aussi du Maghreb) et d'autre part, créer des emplois en misant sur l’agro-industrie et les PME de l’aval. Toutefois je ne pense pas qu'il faut attendre 30 ans pour se soucier des questions environnementales, de santé et d’alternatives au modèle productiviste basé sur l’importations d’intrants et d’énergie fossile. La conception de ces alternatives va prendre du temps et il faut aussi travailler sur la période de transition qui peut correspondre à une ou deux décennies. La première motivation de cette agro-écologie est de produire avec d’autres facteurs de production que les intrants et les équipements. Mais dans le texte j’ai bien précisé qu’il fallait mieux utiliser ces intrants sans les bannir de facto. Dans mon entendement l’agro-écologie n’est pas synonyme d’agriculture bio, loin de là. Il s’agit de mobiliser les processus écologiques que l’on trouve déjà dans les écosystèmes mais aussi des innovations (probablement l’énergie solaire), la sélection de micro-organismes utiles, la récupération du phosphore (et des nutiments en génarl) contenus dans les eaux usées, etc.. Patrick Dugué
Ecrit le 20 mars 2013 par : Patrick Dugué patrick.dugue@cirad.fr 2818

En réponse à Serge VALET Votre commentaire rappelle les avantages indéniables des cultures associées surtout dans les zones humides où l'alimentation hydrique des cultures est bien assurée et sur une longue période de l'année. Mais il ne faut pas oublier les contraintes de ces systèmes de cultures associées (le coût en travail). Si comme vous l'écrivez "les associations culturales multi étagées traditionnelles & innovantes excessivement inspirées de la nature représentent le meilleur système cultural ou "révolution triplement verte", elles seraient plus largement utilisées et se maintiendraient dans les systèmes agraires, ce qui n’est pas toujours le cas. Une solution dans un contexte donné (le tropique humide dans votre cas) qui est « façonnée » dans le temps par les agriculteurs, est un gage de robustesse et d’efficacité mais ne peut pas être transférée à toute situation. Là aussi il n’y a pas de solution passe partout. Patrick Dugué
Ecrit le 22 mars 2013 par : Patrick Dugué dugue@cirad.fr 2819

Vientiane Laos le 12 avril 2013. Merci de ce débat... presque complètement transposable à l'Asie du Sud Est sauf que ici les liens entre productions et marchés sont souvent présents et actifs .. Sinon les questionnements sont les mêmes et les propositions jamais universelles... Les innovations agro-écologiques se font "en dernier recours" ... lorsque toutes les "ficelles" ont été tentées.... Beaucoup de bailleurs de fonds ont adopté dans les pays en voie de développement le langage des décideurs des pays développés... "lorsqu'un produit est bon, il se diffuse tout seul... exemple la crème Nivea ou le téléphone mobile...." Ils oublient toutes les mesures d’accompagnement et de logistique qui permettent de mettre ces produits à la disposition du grand public pour un prix "attractifs" et des impacts immédiats. Le succès de la production cotonnière en AFO résulte entre autres de la convergence entre: i) une culture avec un prix de vente intéressant et quasi garanti; ii) une R-D performante qui a su proposer des "paquets techniques" intéressants; iii) des sociétés cotonnières qui on su relayer ces innovations et mettre à la disposions des producteurs crédits et autres facilités pour l'adoption des innovation; iv) des producteurs performants et enfin v) un appui des bailleurs de fonds sur le long terme.... Dommage que les bailleurs de fonds ne tirent pas plus d'enseignement de ces succès. Remerciements à tous pour la qualité des débats. JC Legoupil
Ecrit le 12 avril 2013 par : JC Legoupil legoupil@cirad.fr 2825

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