La filière palmier à huile de Côte d’Ivoire en plein essor face aux nouveaux défis du secteur

8 octobre 2018
Jean-Louis Kodo, président du Conseil d’administration de l’Association interprofessionnelle de la filière palmier à huile de Côte d’Ivoire (AIPH)


Secteur porteur pour l’économie du pays, la filière palmier à huile positionne la Côte d’Ivoire au 9ème rang mondial et au 2ème sur le continent africain, avec une production de régimes de palme de 1 800 000 tonnes (dont 1 000 000 tonnes issues des plantations villageoises) pour une production d’huile brute de 420 000 tonnes. Les revenus annuels perçus par les planteurs sont de 50 milliards FCFA contre 500 milliards FCFA de chiffre d’affaires cumulé pour la première et la deuxième transformations. Mais comment cette filière a-t-elle évolué ?

 
 

Suite aux difficultés financières des années 1990, l’Etat ivoirien s’est progressivement désengagé de nombreux secteurs d’activités dont la filière palmier à huile, l’exposant ainsi à un défi d’organisation et de gouvernance. L’AIPH, Association interprofessionnelle de la filière palmier à huile, a été la réponse adéquate à ce défi de structuration de la filière. Elle regroupe trois collèges, la FENACOPAH-CI, l’APROSAPCI et le GITHP, représentant respectivement les petits producteurs, la première et la deuxième transformations. L’interprofession a été créée en 2003 et reconnue comme telle par le décret n°2015-127 du 04 mars 2015, avec pour principales missions d’assurer un cadre de concertation, de règlementation et d’amélioration de la compétitivité, ainsi que le rayonnement de la filière palmier à huile de Côte d’Ivoire.

Après une décennie d’autonomie au niveau de l’organisation et face à un environnement économique très instable, quels défis se dressent sur le chemin de la filière palmier à huile ?

La réponse à cette question est à examiner sous deux angles : celui des défis connus et celui des nouveaux défis résultant d’un environnement changeant avec des contraintes nouvelles. Une préoccupation bien connue de la filière est celle du dénigrement de l’huile de palme, qui serait la cause de la destruction de la faune et de la flore, et nuisible à la santé des consommateurs. Rappelons à ce sujet que la filière a remporté le procès contre le distributeur Super U en 1993, ce qui a permis de rétablir la vérité scientifique selon laquelle l’huile de palme n’est pas plus nocive qu’une autre. Néanmoins, pour clore définitivement ce chapitre, nous allons apaiser ce débat en pratiquant une production durable qui prend en compte la préservation de l’environnement et de la biodiversité, ainsi que les impacts social et sociétal.

En effet, nous achèverons le processus de l’interprétation nationale des principes et critères de la Roundtable on Sustainable Palm Oil (RSPO) avant la fin de cette année, afin de favoriser et faciliter la certification des acteurs de la chaîne de valeur. La protection de la forêt, le travail des enfants sont aussi des défis que nous relèverons avec la RSPO. Par ailleurs, nous avons mis en place une plateforme sur la durabilité qui regroupe tous les acteurs de la filière pour mieux se conformer aux exigences d’une production responsable d’huile de palme.

La question de la productivité de nos vergers reste d’actualité. Aujourd’hui, les rendements sont de 5 à 7 t/ha pour les petits producteurs et de 10 à 15 t/ha pour les plantations industrielles, alors que nous disposons d’un matériel végétal amélioré avec un potentiel de plus de 25 t/ha. Dans le cadre du projet PSAC (Projet de soutien au secteur agricole), nous avons planté avec ce matériel performant plus de 18 000 ha en trois ans.

La traçabilité des flux de matières, avec l’identification des exploitants et la géolocalisation des parcelles, est également une préoccupation majeure. De même que l’accès aux intrants, en particulier les fertilisants, pour permettre aux producteurs d’accroître les rendements, surtout dans les plantations villageoises. Les solutions mises en œuvre reposent sur l’élaboration de programmes et des partenariats avec des grands groupes, visant à fournir des engrais en priorité pour tout le verger villageois.

Reste enfin la question de la déforestation. Comme indiqué plus haut, la filière palmier à huile de Côte d’Ivoire est résolument engagée dans la durabilité avec son processus d’interprétation nationale des principes et critères de la RSPO, qui à terme se concrétisera par la certification de toute la chaîne de valeur. Dans cette perspective, la filière observe déjà une politique de zéro-déforestation. L’AIPH est partenaire de Proforest de Redd+, de la plateforme TFA (Tropical Forest Alliance) 2020. Ainsi elle encourage à produire en suivant les principes suivants : intensification agricole avec un matériel végétal amélioré, offre d’un conseil agricole dédié pour promouvoir et appliquer les bonnes pratiques agricoles, et fertilisation adaptée des plantations de palmier à huile dans les zones de production.

La durabilité a un prix. La filière est bien consciente de cet enjeu et investit massivement dans cette direction. Mais elle ne pourra mener à bien sa transformation que si elle a accès à des financements appropriés, lui permettant de conjuguer l’amélioration de ses performances économiques et la rémunération des biens publics créés notamment à travers la conservation de la forêt et de la biodiversité.


 


2 commentaire(s)
Est-il possible de faire de l'huile de palme Bio avec un rendement économiquement viable?
Quelle est la part de la production africaine consommée en Afrique?
Ecrit le 8 octobre 2018 par : Alain Cornet-Vernet acv.conseil@gmai.com 3651

Honneur au P.I.N !
Merci monsieur le Président, de souligner l'importance du moment du "Processus d'Interprétation Nationale" (sous-entendu Sectorielle) dans toute stratégie de progrès de la Qualité (durabilité, traçabilité,..). Moment technique, pédagogique, tactique mais fondamental pour la Confiance, le Contrôle, la Certification, la Communication et finalement la Valeur (V = 4 C). Tous nos voeux à l'Interprofession et à la plate-forme de durabilité. Fortitude aux animateurs.
Ecrit le 8 octobre 2018 par : jean-marie bouquery 3652

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