Pour vaincre la faim, ne pas laisser le marché agir seul !

27 avril 2017
Jean-Marc Boussard
Membre de l’Académie d’Agriculture de France, auteur du livre Les prix agricoles, nouveaux dialogues sur le commerce des bleds, L’Harmattan, Paris, 2017.


Au fil des ans, l’Afrique au sud du Sahara importe de plus en plus de produits alimentaires et en exporte de moins en moins. La situation est fort préoccupante, surtout si l’on se rend compte qu’une partie importante du déficit est payé par des exportations de matières premières (essentiellement du pétrole) qui ne seront pas forcément durables.

La cause primaire du phénomène est évidemment la croissance démographique, qui augmente le nombre de bouches à nourrir. Mais évidemment aussi, il faut incriminer la faiblesse de la production agricole qui ne suit pas la démographie. De fait, les rendements agricoles sont faibles et n’augmentent pas, alors qu’ils croissent plus vite que la population presque partout dans le monde.

Or une telle situation est d’une absurdité totale. Les conditions naturelles en Afrique sont exceptionnellement favorables à la production de « biomasse ». Par ailleurs, s’il est un phénomène démographique qui se vérifie partout dans le monde, c’est bien le fait que la prospérité - spécialement alimentaire - diminue la natalité : un accroissement des rendements devrait donc améliorer les choses par les deux bouts, à la fois en augmentant la production alimentaire et en diminuant la natalité grâce à la prospérité des populations rurales (celles où la démographie pose problème). 

Mais pourquoi les rendements n’augmentent ils pas en Afrique comme ailleurs ? L’explication la plus simple (voire simpliste) est que les agriculteurs africains sont arriérés et trop mal informés pour profiter des bienfaits de la Science comme le font leurs confrères européens ou américains... C’est un peu court : en réalité, sur les moyens d’augmenter les rendements, les paysans africains en savent bien plus que ne le croient les fonctionnaires internationaux. Mais ils n’ont aucun intérêt à le faire. Pire : ils souhaiteraient le faire, mais ne le peuvent pas.

De fait, le principal obstacle à l’utilisation des méthodes modernes dans l’agriculture africaine est le manque de capital : on peut bien savoir qu’il faut irriguer, mettre des engrais et utiliser des semences sélectionnées, si l’on manque d’argent pour acheter ces ingrédients, on sera contraint d’utiliser les méthodes traditionnelles. Or les agriculteurs africains, en général, ont assez peu d’argent, justement à cause de la faiblesse de leurs rendements... 

Evidemment, ils pourraient emprunter. Cela devrait-être d’autant plus facile que, chez eux, la productivité du capital est énorme, comme c’est logique pour un facteur de production aussi rare. De fait, lorsqu’on observe les transactions financières courantes dans les campagnes, les taux d’intérêt sont énormes : un contrat « classique » consiste en ce que « je te prête un sac de riz aujourd’hui et tu m’en rends deux dans trois mois ». C’est là un taux d’intérêt de plus de 600 %, de quoi faire saliver tous les banquiers de la terre, qui devraient supplier les Africains de leur demander des crédits à des taux pareils... Il est vrai que le contrat en question comporte une clause subsidiaire : « si tu ne peux pas me rendre mon sac cette année, tu le feras l’an prochain, ou même dans deux ans ». Cela fait significativement baisser l’espérance de taux d’intérêt, plus proche en réalité de 50 % que de 600 %. N’importe : une rentabilité de 50 % n’est tout de même pas courante et mériterait un peu d’attention de la part d’un banquier soucieux de bonnes affaires.

Alors, pourquoi les banquiers ne prêtent-ils pas aux agriculteurs africains, ce qui permettrait d’améliorer les rendements pour le bonheur de tous ? C’est que les banquiers sont prudents, et que la production agricole est risquée. Il y a en effet deux sortes de risque en agriculture.

Le premier est le risque de rendement : tout le monde le sait, on peut être un excellent agriculteur et ne rien récolter en cas de sécheresse ou d’épiphytie. Si je prête de l’argent à un agriculteur dans cette situation, il ne pourra pas me rembourser et je perdrai mon capital... Ce risque-là est cependant moins grand qu’il n’en a l’air, parce qu’un agriculteur peut être sinistré sans que son voisin le soit. De ce fait, ce risque-là est « assurable » : le banquier peut en effet perdre un peu de son capital, mais si sa clientèle est tant soit peu diversifiée géographiquement, ce ne sera jamais tout. De la sorte, avec des taux aussi élevés, il s’y retrouvera quand même. En outre, beaucoup de ces investissements auxquels peuvent penser les agriculteurs africains sont justement des réducteurs de risque : ainsi, une installation d’irrigation permet de s’affranchir du risque de sécheresse. Enfin, des assurances indicielles contre les aléas climatiques, relativement peu coûteuses pour les producteurs, se développent en Afrique. Le risque de rendement ne devrait donc pas être un obstacle à la fourniture de crédit aux agriculteurs.

Mais il existe en agriculture un autre risque, autrement important même (et surtout !) pour un banquier, c’est le risque de prix (figure 1). Les prix bas, à un moment donné, touchent tous les agriculteurs d’une région. Il en résulte que si le risque se matérialise, le banquier se trouvera bientôt dans la même situation que ses clients, en cessation de paiement. Or, ni les banquiers, ni les agriculteurs ne tiennent beaucoup à se trouver en cessation de paiement. Et la parade est toute trouvée : on n’emprunte pas, on ne prête pas et les rendements n’augmentent pas...

Figure 1
Sources : FAO - Nouvelles des marchés
Les prix de produits vivriers sont extrêmement fluctuants et variables d’un endroit à un autre.
Encore ces moyennes mensuelles sont-elles lissées par rapport aux prix quotidiens…


Mais alors, pourquoi les prix varient-ils ainsi, créant contre toute attente un cercle vicieux quand ils devraient efficacement informer les producteurs des désirs des consommateurs, et les consommateurs de la difficulté de produire, comme le stipule la théorie élémentaire des prix enseignée dans les facultés d’économie ?

C’est que les prix agricoles ne sont pas comme les autres. La demande de produits alimentaires est rigide parce que les consommateurs se priveront de tout autre chose plutôt que ne nourriture si les prix sont hauts. Inversement, ils n’augmenteront pas leur consommation de nourriture s’ils baissent. L’offre, de son côté, est élastique parce que, contrairement à ce que croient les gens peu informés, les agriculteurs « répondent aux prix », en augmentant leur production quand les prix sont hauts, en la diminuant quand ils sont bas. Mais cette réponse est lente, parce que les délais de production sont longs. De telles conditions, demande rigide, offre élastique et longs délais de production sont exactement ce qu’il faut pour que les prix fluctuent sans cesse dans un régime chaotique (le mot, ici, étant employé dans son sens mathématique, assez subtil, mais signifiant tout de même un grand désordre). Pour cette raison, les prix agricoles sur un marché « libre » ne sont jamais « à l’équilibre », toujours trop bas ou trop hauts, en tous cas « risqués », comme on le voit sur n’importe quelle série chronologique un peu longue. Et ce phénomène empêche les prix de jouer le rôle qui est le leur en bonne théorie économique, parce que les producteurs sont sensibles non seulement à la moyenne des prix, mais encore à leur variabilité.

Dans le cas africain, il y a un obstacle supplémentaire à l’efficacité des prix : les mauvaises infrastructures, qui allongent les délais entre le moment où l’on reçoit l’information, et celui où la marchandise peut arriver sur le marché. J’ai 15 kg de mil à vendre : je viens de recevoir l’information que le prix est excellent sur le marché de la ville voisine à 20 km. Vais-je faire le voyage à pied avec cette charge sur la tête, quand je sais que dans la soirée, quand j’arriverai, le prix aura peut-être chuté de moitié ? Je reste chez moi, avec mon stock bien à l’abri, en attendant une occasion de voyager de façon plus confortable...

Dès lors, quels remèdes ? Beaucoup sont possibles, en particulier créer des routes ou des transports en commun comme on vient de le voir. Mais l’essentiel avait été trouvé par les conseillers du président Roosevelt des Etats Unis dans les années 1930 : il faut couper les liens entre l’agriculture et le marché par des prix garantis et d’autres mesures similaires. Dans tous les pays où de telles politiques ont été essayées - y compris en Afrique, en particulier pour les « cultures d’exportation » de type « colonial » - les mesures de ce type ont conduit à de spectaculaires augmentations de production, au point d’engendrer une autre plaie, la « surproduction ».

Mais que vaut-il mieux : un peu de surproduction, ou la famine ? 


 


8 commentaire(s)
limpide, éclairant et synthetique
merci
Ecrit le 2 mai 2017 par : side claude stephane sidestephane2008@yahoo.fr 3322

Excellent article très clair et convaincant
Applicable au Sahel auquel la Ferdi s'est particulièrement intéressée et où la croissance de la population est la plus rapide au monde
Ecrit le 2 mai 2017 par : Guillaumont Jeanneney Sylviane s.@udamail.frguillaumont 3323

Bon article mais comment vaincre la faim avec la persistance des conflits armés avec une sécurité alimantaire basée sur l'aide alimentaire.
Dans ce contexte les facteurs évoqués dans cet article ne peuvent être pris en compte parce que la paix vient avant tout c'est ce que mon pays la Rca vit actuellement
Ecrit le 2 mai 2017 par : Dr Beassem Joel Beassem. joel@gmail.com 3324

Bonjour,
J'adhère à cette analyse économique de Jean-Marc Boussard qui rompt opportunément avec les visions libre échangistes portées notamment par les APE. Il manque toutefois la dimension institutionnelle et politique du contexte africain. Et je renvoie à cet égard à l'analyse de Serge Michailof et Olivier Lafourcade de mars 2017 et qui s'intitule : Que faire face à la déstabilisation du Sahel et aux risques qu'elle représente pour l'Afrique de l'Ouest, pour la France et pour l'Europe ? Je cite ces auteurs : "" Certes l’Afrique a désormais décollé  Après 20 ans de stagnation voire de crise économique jusqu’à la fin des années 1990, depuis 15 ans l’Afrique a enfin décollé.  Ses taux de croissance (6 à 7 % annuel) ont fait rêver, ses indicateurs sociaux s’améliorent, la démocratie progresse, les sociétés civiles s’organisent, une petite classe moyenne apparaît.  Ses réserves de matières premières semblent inépuisables.  Sa population en accroissement rapide offre de nouveaux débouchés... Mais deux « nuages » inquiétants apparaissent à l’horizon:  (a) le ralentissement économique, et (b) l’insécurité qui devient un sujet majeur Sur la montée de l’insécurité :  Celle ci se traduit certes par des attentats terroristes spectaculaires: (Bamako, Ouagadougou, Grand Bassam).  Mais de tels attentats ont aussi frappé Paris, Nice et Berlin…  Il ne s’agit en Afrique que de la partie visible d’un phénomène plus grave, qui est la lente dégradation sécuritaire dans des régions délaissées de longue date par les pouvoirs publics. ""
Ecrit le 2 mai 2017 par : Loyat Jacques j.loyat@gmail.com 3325

J'ai lu l'article qui aborde un problème d'actualité en Afrique. L'accent a été mis sur la possibilité d'assurance et d'organisation des filières afin de garantir notamment le prix aux producteurs. Tout en partageant ces points de vue, j'ai l'impression que trois aspects importants du retard de la transition agricole en Afrique subsaharienne ont été occultés:
1) Les filières organisées dans cette région ne l'ont pas toujours été dans le sens de l'amélioration des conditions de vie du producteur. Les prix garantis aux producteurs de coton et le mode de gestion du paiement de ces derniers (caution solidaire) ne sont pas toujours de l'avantage de ces producteurs. Pour preuve, les zones de forte production cotonnière en Afrique de l'Ouest demeurent des zones de fort taux de pauvreté rurale. C'est l'exemple de la région de Sikasso au Mali et du département du Borgou au Bénin. 2) Les politiques agricoles en Afrique subsaharienne sont souvent élaborées sans considération des modèles théoriques existantes en la matière. Les actions planifiées et mises en oeuvre ne permettent pas la cohérence et la logique nécessaires pour donner un coup de fouet au système agricole dans son ensemble. Il faut noter que l'agro-industrie reste très faiblement développée dans cette région. Pourquoi ? ... 3) De façon générale, la gestion du secteur agricole en Afrique subsaharienne aboutit à un fort taux de pauvreté chronique au sein des producteurs. Et c'est le véritable obstacle d'adoption des technologies améliorantes de la production agricole. Je viens de publier à cet effet un livre aux Editions Universitaires Européennes. Il est intitulé "Pauvreté chronique et évolution agricole en milieu rural africain". Ce livre présente le modèle explicatif du retard agricole de l'Afrique. J'aurais souhaiter joindre cette modélisation à ce message, mais je n'ai pas pu. Ce sont là d'autres goulots importants à lever.
Ecrit le 2 mai 2017 par : Dr Emile N. Houngbo enomh2@yahoo.fr 3326

Bonjour,
L'article de Jean-Marc Boussard donne un éclairage intéressant sur les raisons de la non-augmentation des rendements en Afrique à partir de la volatilité des prix. Cette explication est intéressante mais me semble-t-il secondaire par rapport aux premières causes: - nombre important de petits agriculteurs, ayant une position de faiblesse par rapport à la filière, -non solvabilité de petits agriculteurs vis-à-vis du secteur bancaire, -relative complexité du développement agro forestier qui évite des intrants et nécessite une bonne formation -système d'aide internationale délaissant l'agriculture, passant par les états, qui ont eux-mêmes du mal à organiser le développement et la formation agricole Ce sujet est capital car il conditionne la sécurité alimentaire alimentaire et le développement des villes. Pour les solutions je rejoins en partie Jean-Marc Boussard avec la fermeture des frontières, la taxation des importations des produits alimentaires de première nécessité ou encore la fixation de prix garantis. Il faut simultanément financer la création de ce de structures coopératives de regroupement des petits agriculteurs, les former, et les aider à organiser le développement agro forestier, si possible en partenariat avec des industriels organisant eux-mêmes la filière de conditionnement et de commercialisation. Il y a également une réflexion à avoir sur le financement de projets importants par la communauté internationale, qui souvent s'arrêtent quand les financements eux-mêmes prennent fin. Ne faudrait-il pas davantage financer directement, sans passer par les Etats des petits projets portés par des O.N.G. et animé par des volontaires ? Ces projets démarrent doucement mais en plus de chances de laisser des traces durables sur le terrain, à partir du moment où ils travaillent avec les acteurs économiques locaux, avec des stratégies commerciales professionnelles. (Exemple du maraîchage au Sénégal) Michel de Galbert 3 Mai 2017
Ecrit le 3 mai 2017 par : Michel de Galbert micheldegalbert@gmail.com 3330

Commentaire en réponse
Je suis flatté de ces commentaires favorables, et complètement d’accord avec les compléments apportés par les critiques ! Bien sûr que que l’insécurité physique associée aux guerres et aux troubles sociaux est la cause majeure de l’insuffisance de production que l’on observe dans les endroits concernés. Mais il n’y a pas la guerre partout, fort heureusement. Et de toute façon, après la guerre, il faut reconstruire : c’est à ce stade que je me situais dans ce «blog». En vérité, le maintien d’une vraie sécurité physique, par exemple par la création d’une gendarmerie rurale efficace et respectée, fait partie des «infrastructures» auxquelle je songeais, au même titre que les routes ou les retenues d’eau. Bien sûr aussi que les institutions pour la collecte et la commercialisation des récoltes sont indispensables. Aucun agriculteur ne produira jamis rien s’il n’est pas sûr de vendre! De telles structures peuvent être étatiques, coopératives ou privées. Les «libéraux» ont bien raison de dire que les institutions étatiques sont en général à éviter, parce que trop sensibles à la corruption. Mais ils ont tort de supposer que les coopératives et les commerçants privés se développeront de façon spontanée sur la base des incitations du marché : dans un système de prix fluctuants, de telles entreprises sont tout aussi aussi fragiles (et même plus!) que les paysans. C’est bien pour cela qu’elles naissent rarement de façon spontanée. En revanche, comme les agriculteurs eux mêmes, elles peuvent se développer si elles sont raisonnablement sûres du régime de prix au sein duquel elles vont opérer. A noter que, dès lors qu’il existe un «prix garanti», il n’y a plus de problèmes de négociation de marchands de tapis entre les agriculteurs, les «intermédiaires», et les consommateurs finaux... Quand à la pauvreté, il est évident que, en l’absence d’économies d’échelles dans le secteur, comme les artisans, qui sont dans la même situation, les agriculteurs sont et resteront «plutôt pauvres». De fait, il ne faut pas compter faire fortune en restant agriculteur ou artisan. Mais, comme les artisans, les agriculteurs, pour produire efficacement, doivent disposer d’un capital relativement important, ce qui interdit de les classer dans la catégorie «misérable». Et c’est bien le problème des agriculteurs africains : passer de «misérables» à « modestement pauvres »... Enfin, évidemment, les garanties de prix ne vont pas à elles seules miraculeusement sauver l’agriculture africaine. Elles constituent seulement l’une des conditions du sauvetage...
Ecrit le 5 mai 2017 par : Jean-Marc Boussard jmarc.boussard@orange.fr 3331

Bonjour
Pour répondre à l’enjeu des objectifs prioritaires en terme du développement, la chaîne de valeur inclut des activités telles que, la production, la commercialisation, la distribution et les services de soutien jusqu’au consommateur final. Le mil, le sorgho et maïs sont à elles les céréales les plus consommées au Mali, en particulier dans les zones rurales et par les Maliens aux revenus les plus faibles. Donc, la performance de ces chaines de valeur a d’importantes implications pour la sécurité alimentaire d’un grand nombre de Maliens. Pour que l’accélération de la croissance agricole réduise sensiblement la pauvreté et améliore la sécurité alimentaire, la stratégie de croissance doit se focaliser non seulement sur l’augmentation globale de la production mais aussi sur les entités qui participent à cette croissance. Le rôle de l’agriculture et du secteur alimentaire dans la création d’emplois productifs pour le nombre croissant de jeunes qui entrent sur le marché du travail sera au moins aussi important pour le pays que la capacité du secteur à produire des denrées alimentaires. Déterminer l’état de la sécurité alimentaire et remédie la pauvreté d’ici l’horizon 2030 en mettant a l’évidence la croissance démographique. Démontre l’efficacité du système de la qualité des produits en évitant la chute des prix à la récolte Evaluer la valeur ajoute des produits selon les normes des consommateurs Acquérir des compétences commerciales entre producteurs et consommateurs sur la vente des céréales propres et exiger un sur- prix Approvisionner les marchés urbains de plus en plus lointains et de plus en plus vastes les produits du lieu de production ou du lieu de transformation, au lieu de consommation.
Ecrit le 6 mai 2017 par : Abdoulaye oumar Soumare soumare.abdoulayeo1@gmail.com 3332

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