|
Compte-rendu de Tech For Food 2009
La troisième édition du forum Tech For Food (TFF) a eu lieu mercredi 25 février au Salon International de l’Agriculture, rassemblant près d’une centaine de personnes de divers horizons mais partageant une même conviction : les technologies de l’information et de la communication (TIC) peuvent être mises au service du développement agricole et de la sécurité alimentaire des pays en développement. Cette année TFF proposait aux participants un focus sur l’expérience indienne dans le domaine des TIC, plusieurs projets ont été présentés par des intervenants venant du pays des révolutions agricoles : eSagu, Village Knowledge Centres, Village Resource Centres, e-Choupal, Digital Green, Akashganga, Nokia Life Tools. Des projets européens ont aussi été présentés : e-agriculture, SIST et Educ’Phyto.
- Sophie Treinen
La journée a commencé avec la présentation de la plateforme e-agriculture.org par Sophie Treinen de la FAO. Lancée en septembre 2007 par la FAO, e-agriculture.org est une plateforme internet dont la mission est de servir de lieu de rencontre et d’échange entre des acteurs intéressé par l’utilisation des TIC dans le développement de l’agriculture. Elle regroupe actuellement plus de 4300 membres de divers horizons. Madame Treinen a réitéré notamment l’intérêt d’avoir des partenaires francophones pour enrichir les contenus et les échanges en langue française dans la plateforme.
Joël Sor et Thierry Helmer ont à leur tour présenté la plateforme SIST (Système d’Information Scientifique et Technique),
lancé par le CIRAD il y a quatre ans et déjà mis en œuvre dans neuf pays d’Afrique. Un des principaux objectifs du SIST est servir de vitrine de l’activité scientifique nationale et régionale en Afrique sur le Web. Le modèle de structuration du SIST en chaque pays donne priorité à l’autonomie du système, demandant une participation active d’acteurs locaux dès le début de sa mise en œuvre. Le Sénégal et Madagascar son les pays où SIST s’est mieux développé jusqu’à présent. Messieurs Sor et Helmer réfléchissent maintenant aux conditions de faire profiter du système les populations locales, les agriculteurs.
Venant de l’Institut International de Technologie de l’Information (IIIT) à Hyderabad le Professeur Krishna Reddy a présenté e-Sagu, un système de conseil technique agricole personnalisé basé sur l’utilisation de technologies de l’information, en particulier, des appareils photo numérique, des CDs, internet et des téléphones portables. Pour une description détaillé du système lisez l’article publié sur le site de FARM auparavant. Le Professeur Reddy a souligné pendant sa présentation l’importance des "coordinateurs" pour le succès du système. Ces médiateurs sont formés à l’utilisation des TIC pour servir de liaison entre les agriculteurs et les experts agronomiques : d’un côté pour renseigner les experts à propos des problèmes auxquels doivent faire face les agriculteurs et, de l’autre côté, pour transmettre et expliquer les conseils techniques formulés par les experts pour les agriculteurs. Professeur Reddy a également précisé que dans la dernière étape du projet pilote e-Sagu des téléphones portables ont intégré la chaine d’information du système : les coordinateurs peuvent maintenant recevoir les conseils agricoles par SMS. Le Professeur Reddy compte maintenant déployer eSagu à une plus large échelle.
Jawahar Kanjilal, directeur en chef des services aux marches émergents chez Nokia, a présenté Nokia Life Tools, une nouvelle gamme de services dans les domaines de l’agriculture, de l’éducation et du divertissement. En ce qui concerne l’agriculture, Nokia Life Tools propose l’intégration à la structure des appareils de téléphonie mobile Nokia des informations customisées aux besoins des agriculteurs. Au début de l’utilisation, l’agriculteur répond à une série de questions dans son téléphone portable pour informer le système à propos de ses besoins spécifiques en information (localisation géographique, type de culture, etc.). Le système pourra donc envoyer à l’agriculteur des informations pertinentes à son activité et les présenter à travers une interface appropriée et simple. Nokia Life Tools sera en phase pilote en Inde au cours de l’année 2009.
Jean-Marc Petat, chef des Affaires Gouvernementales du groupe BASF France, a présenté le logiciel pédagogique de BASF appelé Educ’Phyto, dont l’objectif est de faciliter la formation aux bonnes pratiques d’utilisation de produits phytosanitaires. Lancé en France en 2008, Educ’Phyto est basé sur un mode ludique et propose aux utilisateurs une chasse aux risques de l’utilisation des produits phytosanitaires à travers des images et des animations. En plus d’innover dans l’approche de la formation technique agricole, Educ’Phyto peut être disponible sur des CDs ou sur internet, et la durée totale de la formation est de 15 minutes seulement. Monsieur Petat a parlé de l’intension de BASF d’adapter Educ’Phyto à des diverses réalités agricoles des pays en développement, en particulier en Afrique. Dans ce sens, Bernard Bachelier, directeur de la fondation FARM, a intervenu pour parler de la collaboration entre FARM et BASF dans le cadre des projets vivriers, et de l’intérêt de proposer le logiciel Educ’Phyto aux organisations professionnelles africaines concernées.
Précédé par une allocution de son excellence Monsieur Ranjan Mathai, l’ambassadeur d’Inde à Paris, qui a parlé essentiellement des avancées de l’Inde en termes de développement agricole, y compris à travers l’utilisation des TIC, le Professeur P.C. Kesavan, de la fondation Swaminathan, a fait la principal présentation de la journée. Le Professeur Kesavan a présenté l’approche de la fondation Swaminathan dans le domaine de l’utilisation des TIC pour le développement rural et agricole en Inde. Le projet central de cette approche sont les
centres d’informations appelés Village Knowledge Centres (VKC), à travers lesquels les habitants des zones rurales ont accès à tout un ensemble d’informations. Les principaux ingrédients de ce projet semblent être l’approche intégrée de réponse aux besoins en information de la population rural (informations d’ordre économique, technique agricole et non agricole, administratif, pratique, de santé, ...) et l’importance donnée à la "ownership" des centres par les utilisateurs (avec l’implication de la population dès le début, en termes de contenu mais aussi en termes financier). Tous les participants de TFF se sont réjouit des fondements des activités de la fondation, essentiellement ancrés dans le principe de l’inclusion.
Deux présentations de l’ISRO, l’agence spatiale indienne, se sont succédées. Dans la première, K. R. Manjunath, du Centre d’Applications Spatiales de l’ISRO à Ahmedabad, a parlé du rôle de la télédétection pour le développement agricole et la sécurité alimentaire en Inde. Il a présenté notamment les applications agricoles du Système Indien d’Observation de la Terre (Indian Earth Observation System), parmi lesquelles nous pouvons citer : l’inventaire des cultures agricoles, l’évaluation de l’impact environnemental de l’activité agricole, l’établissement de cartes d’érosion dans tout le pays, le suivi de rotations dans les systèmes de cultures, l’évaluation de l’efficacité d’irrigation, l’inventaire des eaux de surface, l’évaluation des risques de sécheresse, d’inondation, de cyclones, et bien entendu, des prévisions météorologiques.
Dans la deuxième présentation de l’ISRO, Madame Radhika Ramachandran, attaché et conseilleur spatial à l’ambassade d’Inde à Paris, a parlé des Centres de Ressources de Villages (Village Resource Centres), un projet développé en partenariat avec la fondation Swaminathan et qui intègre l’activité des VKC présentés par le Professeur Kesavan plus tôt dans la journée. Madame Ramachandran a expliqué comment l’infrastructure offerte par l’ISRO et gérée selon le modèle de la fondation Swaminathan permet la communication via satellite entre plusieurs acteurs du monde rural et des institutions génératrices d’informations. Les activités développées dans ces centres vont dès l’éducation à distance jusqu’à la télémédecine, passant par des systèmes interactifs de conseil agricole. L’Inde compte déjà 460 de ces centres et le gouvernement est décidé à déployer ce modèle dans des régions où le système n’est pas encore disponible de façon à faire toute la population rurale du pays en bénéficier.
V. Sreenivasan, le directeur des opérations européennes de ITC Infotech, est venu présenter e-Choupal, un projet créé en 2000 par ITC ayant pour objectif faire des agriculteurs indiens des acteurs plus compétitifs. Le réseau compte déjà plus de 6400 centres d’information en Inde, permettant à environ 4 millions d’agriculteurs de vendre leurs produits agricoles, de commander des pesticides et de suivre les cours et marchés via internet. Cette initiative, bien comme le lancement de Nokia Life Tools, montre que le secteur privé ne reste pas en dehors des projets d’application des TIC au développement agricole en Inde.
Rikin Gandhi, de Microsoft Research India, a présenté un projet de partage de bonnes pratiques agricoles via des vidéos participatives, ce projet s’appelle Digital Green. Dans une présentation claire et enthousiaste, Monsieur Gandhi a expliqué comment Microsoft Research était arrivé à la conclusion que, dans le cadre des projets de formation rurale, un des points-clé de succès était la confiance des agriculteurs. Rien de plus légitime dans ce domaine que des messages des propres agriculteurs voulant partager leur savoir-faire avec leurs pairs. Voulant répondre également à la contrainte de l’analphabétisme, Microsoft Research a visé sur l’utilisation de la vidéo. Des petits films, de huit à dix minutes chacun, sont tournés dans les champs pour enregistrer des bonnes pratiques agricoles locales et ont pour acteurs principaux les propres agriculteurs. Après une sélection par l’équipe de Rikin Gandhi, les films son présentés dans plusieurs villages, deux à trois soirées par semaine. Les visionnages des films sont accompagnés d’explications et discussions modérées par un médiateur. Digital Green a déjà dans sa vidéothèque plus de 400 films, et Monsieur Gandhi parle maintenant de passer à une nouvelle phase du projet, pour l’étendre à d’autres régions d’Inde, voir même d’autres pays.
La dernière présentation de la journée a été consacrée à Akashganga, un projet qui utilise les technologies de l’information pour faciliter la collecte du lait en Inde. Shah Alpesh Chandrakant, directeur financier, et Shah Sachin Navnitlal, directeur des TIC d’Akashganga, ont présenté le système d’automatisation de la pesée du lait, de réalisation de tests de qualité et d’évaluation des taux de matières grasses, ce qui permet le payement immédiat des producteurs. Le système est présent dans près de 1500 villages en Inde, touchant des millions de producteurs.
Pour savoir plus sur Tech For Food : TFF 2009
Retour à la page principale TIC
